La semaine dernière, je me promenais avec une amie qui venait de sortir d’une grave maladie. Elle me raconta être allée voir un grand Rav qui lui avait assuré qu'une personne lui en voulait énormément, ce qui expliquait ses problèmes.
Dans la nuit, elle rêva de son ex-fiancé qu'elle avait quitté violemment 10 ans plus tôt. Peu de temps après leur séparation, elle s'était mariée avec un autre.Voulant en avoir le cœur net, elle prit son téléphone pour l'appeler, mais leur conversation tourna court :
« Qu'est-ce que tu me veux ? »
« Voilà depuis le temps, je voulais prendre de tes nouvelles et savoir si tu m’en voulais encore pour ce qui s'est passé entre nous ? »
« Sache que si je te croisais dans la rue, je te cracherais dessus, au revoir ». Puis il lui raccrocha au nez…
Choquée par sa réaction, elle ne comprenait pas sa violence. Même s'il n'avait pas encore d'enfant, il était marié depuis quelques années, alors pourquoi la détestait-il toujours autant ?
Après l'avoir écoutée, je ne pus me retenir de lui rapporter des paroles de sagesse entendues il y a six ans lors d’un cours de Torah de Mme Bénitah qui a bouleversé ma vision du Chalom, de la paix.
Lors de son cours, la Rabbanite affirma : « Depuis la querelle entre Moché Rabbénou et Kora’h, il n'existe plus de conflit où l'on peut prétendre que l’un a tort ou que l’autre a raison. À partir du moment où il y a une dispute, nous devons nous remettre en question chacun de notre côté ».
Pour illustrer son propos, elle raconta une histoire bouleversante :
Depuis 8 ans, Sarah n'arrivait pas à avoir d'enfants. Un jour, son amie lui rendit visite et lui raconta qu'en vacances en Israël, elle avait croisé leur ancienne camarade de classe, Rivka :
« Lors de notre discussion, au moment où je prononçai ton nom, Rivka eut une réaction très violente. Elle me décrivit longuement les humiliations que tu lui avais fait subir au lycée. Pour elle, son manque de confiance en elle et son célibat découle de cela. Depuis 8 ans que tu n'arrives pas à avoir d'enfant, tu devrais l'appeler pour rétablir le Chalom. J'ai l'impression que tes problèmes viennent de là. »
Le jour même, Sarah lui téléphona pour s'excuser, n’ayant que de vagues souvenirs de cette période de son adolescence. Lorsqu’elle entendit sa voix, Rivka ne put retenir sa colère :
« Depuis plus de 10 ans, je souffre à cause de toi et je n'arrive pas à me marier. Tu penses vraiment qu'un simple appel va tout arranger ? » Puis elle lui raccrocha au nez…
Sentant qu'elle devait arranger les choses à tout prix, Sarah prit un billet d'avion et se rendit en Israël. Lorsque Rivka ouvrit la porte de chez elle, Sarah se jeta dans ces bras en larmes afin de lui demander pardon :
« Rivka, je ne suis plus la Sarah méchante du lycée, Hachem m'a tellement éprouvée depuis... Si j'avais su la portée de mes propos à l'époque, jamais je ne me serais comportée ainsi ! »
Ce qui vient du cœur va droit au cœur, Rivka éclata en sanglots et lui pardonna. Avant de se quitter, elles se promirent d'assister à la ‘Houppa de l'une et à la Brit-Mila du fils de l'autre, mais aucune ne put tenir promesse car la Brit-Mila tomba le jour de la ‘Houppa...
Suite à ce cours, je repensai à toutes les personnes que j'avais pu offenser dans ma vie : trois personnes me sont alors venues en tête. Ne perdant pas une minute, je les recherchai sur Facebook. Une fois que je les eus trouvées, le Yétser Hara' commença à m'attaquer :
« C’était au lycée, à quoi bon ? Elles vont te prendre pour une folle ou se moquer de toi ! Tu ne vas pas te rabaisser quand même ? Laisse tomber, tu le feras plus tard ! »
J'étais à deux doigts de cliquer sur "Annuler" jusqu'à ce que je me souvienne qu'à chaque fois que j'avais repoussé une Mitsva, elle m'avait filé entre les doigts. Cette fois ci, j'irai jusqu'au bout.
Me rappelant le cours de Mme Bénitah, je n'ai pas cherché à me justifier, ni à leur rappeler leurs erreurs. Je me suis concentrée uniquement sur mes fautes et en quoi mon comportement avait pu les blesser, puis je me suis excusée.
Après avoir cliqué sur « Envoyer », je me suis sentie mal. J'avais l'impression d'avoir passé la serpillère sur mon amour-propre.
J’actualisai mes mails toutes les deux heures, redoutant des réponses pleines de reproches. Au bout de deux jours, elles me répondirent toutes les trois de manière identique :
« Tu n'as pas à t'excuser, j'avais mes torts également. À l'occasion, ça me ferait très plaisir de te revoir ». Et pour deux d'entre elles, nous nous sommes revues…
Grâce à leur réponse, je venais de comprendre qu'en se disputant avec l'autre, c'est soi-même que l'on punit. En plus de se priver d'une relation enrichissante, on développe de la rancœur, de la colère, voire de la haine. De tels sentiments nous éloignent d'Hachem, ce qui explique que même à Kippour, D.ieu ne peut nous pardonner les fautes envers notre prochain.
Combien de conflits, combien de relations brisées pourraient être évités si nous arrivions à mettre notre amour-propre de côté et à travailler nos mauvaises Middot, au lieu de vouloir changer celles des autres.
Toutes les veilles de Roch Hachana, les SMS de Mé’hila (d’excuses, de pardon) pleuvent. Vous remarquerez que ce sont les personnes que l'on affectionne le plus qui nous les envoient. Alors cette année, profitons du mois d'Eloul pour faire la liste de ceux que l'on a vraiment pu offenser : un ancien camarade, une relation professionnelle ou autre, et avec sincérité, demandons-leur pardon en priant qu'à Kippour, le Maître du monde nous pardonne à Son tour.