Le calendrier juif, comme une spirale qui se déroule dans le temps - et qui d’après le Rav Dessler nous ramène chaque année au même point, mais chaque fois un peu plus en avant dans l’histoire - commence avec Eloul.
Même si officiellement, c’est Tichri le premier mois de l’année , Eloul, c’est la prépa, l'antichambre, l’avant-goût. La répétition générale. D’ailleurs ce mois est symboliquement représenté par la vierge (Bétoula), car la feuille du cahier est à nouveau blanche et tous les “possibles” sont une nouvelle fois envisageables.
On aurait presque mis Eloul au printemps, puisque ce mois évoque une renaissance, un bain de jouvence. Eh bien non ! Eloul sera le mois qui annonce l’automne et c’est avec la mélancolie des feuilles mortes qu’on débutera l’année : car pour les Juifs, c’est quand on croit que tout est fini que tout recommence...
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On connait les histoires du Shtetl d’avant-guerre, où la seule mention du mot “Eloul” remplissait les Juifs d’un sentiment de solennité. On connaît l’anecdote de cette femme qui, passant dans la rue devant des petits galopins qui se disputaient, prononça le mot magique et vit les enfants cesser immédiatement leurs chicaneries. Le Rav Yérou’ham de Mir blémissait en proclamant de sa voix grave dans le Beth Hamidrach “Eloul !”, faisant résonner dans l'atmosphère toute la signification de ce mois si particulier…
Même avec tous les efforts de ‘Am Israël, les Séli’hot, les résolutions, la Tsédaka, il faut bien avouer que nous sommes loin de ce vécu d’Eloul si intense. Le Shtetl est mort et la guerre a laissé un fossé infranchissable derrière lequel ces notions de sainteté, d’élévation, de pureté se sont évanouies.
Sans tomber dans le pessimisme du “Avant c’était tellement mieux..”, il faut bien avouer que l’expression “génération orpheline” - Dor Yatom - nous va comme un gant. ‘Am Israël s’efforce de tenir courageusement la route mais le dénouement étant proche - il reste au pire 218 ans, sur 6000 ans d’Histoire - les événements se précipitent, la frénésie s’installe et nous laisse hagards et désemparés.
Mais il nous reste des repères.
Le Créateur nous les a donnés, immuables signaux dans la nuit de l’exil, ils nous accompagnent et nous montrent la direction. Habités de la suprême intelligence, celle de l’âme, du cœur et de l’esprit, sachant lire le futur de leur intuitivité si aiguisée, ils nous indiquent le chemin à suivre : j' ai nommé nos Sages, ‘Hazal, ‘Hakhaménou Zikhronam Livrakha, qui savent en quelques mots englober, définir, solutionner un questionnement et restent d’actualité même 2000 ans après avoir énoncé leurs vérités.
Alors comment vivre Eloul en ce XXIème siècle, avec le Iphone, la techno, le Covid, la confusion, l’effondrement des valeurs, des immeubles, des estrades et des certitudes… ?
Nos Sages de mémoire bénie viennent nous l’apprendre par un acronyme : “Ani Lédodi Védodi Li” (”Je suis à mon Bien-Aimé et mon Bien-Aimé est à moi”).
Si l’on assemble les premières lettres de chaque terme de cette phrase en hébreu, on obtient le mot “Eloul”.
Et si Eloul était une histoire d’amour ? Et si on s’abandonnait ?
C’est bien ce que nos Sages semblent nous dire. C’est comme cela qu’il faut le vivre. Abandonnez-vous à Lui et Il s'abandonnera à vous. Aujourd’hui, plus que jamais, fatigué et désorienté, ‘Am Israël a besoin de Son Bien-Aimé et dans les termes les plus purs d’amour et d’abandon. Ne laissons pas ces notions à Netflix et à Hollywood, qui d’ailleurs se les sont appropriés, en les tronquant à leur façon. Nous devons rapatrier cette notion d’amour, si galvaudée, à notre Bien-Aimé. Les chérubins sur le Tabernacle, seule représentation humaine dans le Temple, étaient enlacés l’un à l’autre à l'image de l’amour du Créateur pour Son peuple.
C’est cela Eloul. Une histoire d’amour incroyable, entre nous et notre Bien-Aimé.
Osons-la !