II y eut une famine dans le pays, outre la première famine qui avait sévi du temps d'Abraham. Isaac alla chez Abimélec, roi des Philistins, à Gherar.
26,2
Le Seigneur lui apparut et dit: "Ne descends pas en Egypte; fixe ta demeure dans le pays que je te désignerai.
Ne descends pas en Egypte
Etant donné qu’il avait l’intention de descendre en Egypte (Beréchith raba 64, 3), comme l’avait fait son père au moment de la famine, Hachem lui dit : « Ne descends pas en Egypte, car tu es une offrande entièrement consacrée à Dieu, et les pays hors celui d’Israël ne sont pas dignes de toi »
26,3
Arrête-toi dans ce pays ci, je serai avec toi et je te bénirai; car à toi et à ta postérité je donnerai toutes ces provinces, accomplissant ainsi le serment que j'ai fait à ton père Abraham.
Toutes ces terres
Haél (« celles-là ») est une forme abrégée de haélè
26,4
Je multiplierai ta race comme les astres du ciel; je lui donnerai toutes ces provinces et en ta race s'estimeront bénies toutes les nations du monde:
Seront bénies par ta descendance
Un homme dira à son fils : « Que ta descendance soit comme la descendance de Yits‘haq », et c’est le sens à donner à cette expression toutes les fois qu’on la rencontre dans le texte. En voici l’exemple-type : « En toi Israël bénira en disant : Eloqim te fasse devenir comme Efrayim et Menachè » (infra 48, 20). De même en ce qui concerne la malédiction, où nous trouvons une tournure identique : « et cette femme [soupçonnée d’infidélité] deviendra un sujet d’imprécation parmi son peuple » (Bamidbar 5, 27), car celui qui maudira son ennemi dira : « Sois comme une telle ! ». De même : « et vous laisserez votre nom comme une malédiction » (Yecha’ya 65, 15), ou encore celui qui jure en disant : « que je sois comme un tel si j’ai fait ceci ou cela ! » (Sifri Bamidbar 6)
26,5
En récompense de ce qu'Abraham a écouté ma voix et suivi mon observance, exécutant mes préceptes, mes lois et mes doctrines."
Avraham a écouté ma voix
Lorsque je l’ai mis à l’épreuve
Il a gardé mon observance (littéralement : « il a gardé ma garde »)
Il s’agit des défenses d’origine rabbinique destinées à nous éloigner du risque de transgression des interdictions de la Tora. Il en est ainsi des unions interdites alors qu’elles ne sont qu’à un deuxième degré de parenté, ainsi que les prescriptions rabbiniques concernant le repos du chabath (voir Yevamoth 21a)
Mes mitswoth
Des commandements qui se seraient imposés même s’ils n’avaient pas été écrits, comme l’interdiction du vol et du meurtre (voir Yoma 67b)
Mes statuts (‘houqothaï)
Il s’agit de commandements au respect desquels nous serions tentés de nous soustraire, soit sous l’influence de notre penchant au mal, soit sous celle des nations du monde. Exemples : l’interdiction de manger du porc ou celle de porter des étoffes faites d’un mélange de laine et de lin (cha’atnéz). Ces commandements n’ont pas de raison connue, mais ils représentent un ordre du roi et Ses instructions à ses serviteurs
Et mes lois
Au pluriel. Y compris la loi orale telle qu’elle a été donnée à Mochè au Sinaï (Yoma 28b)
26,6
Et Isaac demeura à Gherar.
26,7
Les habitants du lieu s'enquérant au sujet de sa femme, il dit: "Elle est ma sœur" car il n'osait dire ma femme: "les gens du lieu pourraient me tuer à cause de Rébecca, car elle est d'une grande beauté."
Au sujet de sa femme
La préposition le (leichto) équivaut à ‘al (« au sujet de »), comme dans : « dis de moi (li) : il est mon frère » (supra 20, 13)
26,8
Or, il y demeurait depuis longtemps lorsque Abimélec, roi des Philistins, regardant par la fenêtre, vit Isaac caresser Rébecca sa femme.
Se prolongeaient
Yits‘haq se dit : « Je n’ai plus, désormais, à m’inquiéter, puisqu’ils ne l’ont pas violée jusqu’à présent » (Beréchith raba 64, 5), de sorte qu’il a cessé d’être sur ses gardes
Avimèlekh regarda
Il l’a vu avoir un rapport avec sa femme
26,9
Abimélec manda Isaac et dit: "Assurément, c'est ta femme; comment donc as tu pu dire: Elle est ma sœur!" Isaac lui répondit: "Parce que je me disais: Je pourrais périr à cause d'elle."
26,10
Abimélec dit: "Que nous as tu fait là! Peu s'en est fallu que l’un de nous n’eut commencé commerce avec ta femme et tu nous aurais rendu coupables."
Quelqu’un (a‘had) du peuple
L’unique dans le peuple, à savoir le roi
Tu nous aurais rendus coupables
S’il avait eu des rapports avec Rivqa, tu aurais amené sur nous une faute
26,11
Abimélec fit une injonction à tout le peuple, en disant: "Quiconque touchera à cet homme ou à sa femme sera puni de mort."
26,12
Isaac sema dans ce pays-là et recueillit, cette même année, au centuple: tant le Seigneur le bénissait.
Dans cette terre-là
Bien qu’il ne fût pas de la même qualité [et donc aussi fertile] qu’Erets Israël lui-même, que le pays des sept nations (Ketouvoth 112a)
Cette année-là
Bien que ce ne fût pas une année normale, puisque caractérisée par la disette
Dans cette terre-là... cette année-là
Pourquoi cette double insistance, [à savoir : ce pays-« là », cette année « là » ? Pour souligner que le pays était dur et que l’année était dure (Beréchith raba 64, 6)
Cent mesures
On avait estimé combien la terre pouvait produire, et elle a produit cent fois plus. Et nos rabbins ont enseigné que cette estimation était nécessaire pour l’évaluation des dîmes à prélever
26,13
Cet homme devint grand; puis sa grandeur alla croissant et enfin il fut très grand.
Jusqu’à ce qu’il fut très grand
On disait : « Mieux vaut le fumier des mules de Yits‘haq que l’argent et l’or de Avimèlekh » (Beréchith raba 64, 7)
26,14
Il avait des possessions en menu bétail, des possessions en gros bétail, des cultures considérables et les Philistins le jalousèrent.
Et beaucoup de serviteurs
Un ouvrage considérable. En français médiéval : « ovreine » Le mot ‘avoda (« ouvrage ») signifie : « un seul travail », et le mot ‘avoudda (tel qu’il est employé ici) signifie : « un ouvrage considérable »
26,15
Tous les puits qu'avaient creusés les serviteurs de son père, du temps de son père Abraham, les Philistins les comblèrent en les remplissant de terre.
Les Plichtim les bouchèrent (sitmoum)
Parce qu’ils disaient : « Ces puits sont notre malheur, car ils risquent de nous attirer des envahisseurs ! »(Tossefta Sota 10, 6) . Le Targoum le traduit aussi par « boucher ». Et dans le langage du Talmud : « boucher (metamtém) le cœur » (Pessa‘him 42a)
26,16
Abimélec dit à Isaac: "Cesse d'habiter avec nous car tu es trop puissant pour nous."
26,17
Isaac se retira de ce lieu, fit halte dans la vallée de Gherar et s'y établit.
Dans la vallée de Guerar
Loin de la ville
26,18
Isaac se remit à creuser les puits qu'on avait creusés du temps d'Abraham son père et que les Philistins avaient comblés après la mort d'Abraham. II leur imposa les mêmes noms que leur avait imposés son père.
Creusa à nouveau
Les puits que les Plichtim avaient comblés, Yits‘haq les creusa à nouveau avant de quitter Guerar
26,19
Les serviteurs d'Isaac, en creusant dans la vallée, y découvrirent une source d'eau vive.
26,20
Les pâtres de Gherar cherchèrent querelle à ceux d'Isaac, en disant: "L'eau est à nous!" II appela ce puits Esek parce qu'on le lui avait contesté.
‘Esseq
Contestation
Parce qu’ils s’étaient disputés avec lui
Ils le lui avaient contesté avec querelle et objections
26,21
lls creusèrent un nouveau puits sur lequel on se querella encore. II lui donna le nom de Sitna.
Sitna
En français médiéval : « nuisement »
26,22
Il délogea de là et creusa un autre puits, qu'on ne lui disputa point; il le nomma Rehoboth, disant: "Pour le coup, le Seigneur nous a élargis et nous prospérerons dans la contrée."
Nous fructifierons dans le pays
Comme le traduit le Targoum : « nous deviendrons nombreux dans le pays »
26,23
II monta de là à Beer Shava.
26,24
L'Éternel se révéla à lui cette même nuit, en disant: "Je suis le Dieu d'Abraham ton père; sois sans crainte, car je suis avec toi, je te bénirai et je multiplierai ta race, pour l'amour d'Abraham mon serviteur."
26,25
II érigea en ce lieu un autel et proclama le nom de l'Éternel. II y dressa sa tente et ses serviteurs y creusèrent un puits.
26,26
Or, Abimélec alla chez lui, de Gherar, avec Ahouzzath son confident et Pikol son général d'armée.
Avec un groupe de ses amis (méré‘éhou)
C’est ainsi que le traduit le Targoum, la lettre mem servant de préposition (« parmi ») à ré‘éhou (« ses amis »). Selon d’autres interprétations, le mem fait partie du substantif méra’, comme dans : « les trente compagnons (meré‘im) » (Choftim 14, 11) de Chimchon (Samson). Ainsi, le mot a‘houzath (« groupe ») serait à l’état construit. Mais il n’est pas d’usage d’employer l’expression, à propos d’un roi, de « groupe [au singulier] de ses amis », car cela impliquerait qu’il serait venu en compagnie de tout son groupe d’amis, et donc qu’il n’en aurait eu qu’un seul. Aussi vaut-il mieux s’en tenir à la première explication. Quant au taw de a‘houzath, il n’y a pas lieu de s’en étonner, même si le mot n’est pas à l’état construit, car on trouve dans le texte des exemples similaires, comme dans : « donne-nous une aide (‘ezrath) contre l’ennemi » (Tehilim 60, 13), ou dans : « ivre (chekhourath), mais pas de vin » (Yecha’ya 51, 21)
Un groupe
Le mot a‘houzath désigne un assemblage, un groupe, où les gens se tiennent (nèè‘hazin) ensemble
26,27
Isaac leur dit: "Pourquoi êtes vous venus à moi, alors que vous me haïssez et que vous m'avez éconduit de chez vous?"
26,28
Ils répondirent: "Nous avons bien vu que le Seigneur était avec toi et nous avons dit: ‘Oh! qu'il y ait un engagement réciproque entre nous et toi!’ Nous voudrions conclure ce pacte avec toi,
Nous avons bien vu (littéralement : « voir nous avons vu »)
Nous l’avons vu chez ton père et nous l’avons vu chez toi (Beréchith raba 64, 10)
Qu’il y ait donc un serment entre nous...
Que le serment qui nous liait depuis l’époque de ton père, soit aussi maintenant « entre nous et entre toi »
26,29
que tu t'abstiendras de nous nuire, de même que nous ne t'avons pas touché, que nous en avons toujours bien usé avec toi et que nous t'avons renvoyé en paix. Maintenant, sois béni de Dieu!"
Nous ne t’avons pas touché
Lorsque nous t’avons dit : « va-t’en de chez nous »
Toi
Toi aussi, agis ainsi avec nous
26,30
II leur prépara un festin, ils mangèrent et burent.
26,31
Le lendemain de bon matin ils se prêtèrent serment l'un à l'autre; Isaac les reconduisit et ils le quittèrent amicalement.
26,32
Or ce même jour, les serviteurs d’Isaac vinrent lui donner des nouvelles du puits qu'ils avaient creusé; ils lui dirent: "Nous avons trouvé de l'eau."
26,33
Il le nomma Chiba; de là cette ville s'est nommée Beer Shava, nom qu'elle porte encore.
Chiv’a
A cause de l’alliance [laquelle est toujours accompagnée d’un serment (chevou‘a)]
26,34
Ésaü, âgé de quarante ans, prit pour femmes Judith, fille de Beéri le Héthéen et Bâsemath, fille d'Élôn le Héthéen.
Agé de quarante ans
‘Essaw est comparé à un porc, ainsi qu’il est écrit : « que le porc de la forêt la mutile » (Tehilim 80, 14). Cet animal, lorsqu’il est couché, étend ses pattes pour montrer ses sabots, comme pour dire : « Voyez, je suis pur, [puisque j’ai le sabot fendu] ! ». Il en va de même des princes de ‘Essaw : ils volent et pillent, tout en se donnant des airs de gens honnêtes. Pendant toutes ces quarante années, ‘Essaw enlevait des femmes à leurs maris et leur faisait violence, et lorsqu’il eut atteint cet âge, il dit : « Mon père a pris femme à l’âge de quarante ans. Je vais faire de même ! » (Beréchith raba 65, 1)
26,35
Elles furent une amère affliction pour Isaac et pour Rébecca.
Une amertume d’esprit
Le mot morath a le sens de « rébellion », comme dans : « vous avez été rebelles (mamrim) » (Devarim 9, 24). Toutes leurs actions étaient cause de courroux et de chagrin..
... Pour Yits‘haq et pour Rivqa
Parce qu’elles pratiquaient l’idolâtrie (Beréchith raba 65, 4)
Etant donné qu’il avait l’intention de descendre en Egypte (Beréchith raba 64, 3), comme l’avait fait son père au moment de la famine, Hachem lui dit : « Ne descends pas en Egypte, car tu es une offrande entièrement consacrée à Dieu, et les pays hors celui d’Israël ne sont pas dignes de toi »