Il est écrit dans notre paracha de la semaine, Vayé'hi (49, 12) : "חַכְלִילִי עֵינַיִם מִיָּיִן וּלְבֶן שִׁנַּיִם מֵחָלָב" (les yeux seront pétillants de vin et les dents toutes blanches de lait).
A propos de ce verset, Rabbi Yo’hanan enseignait : « Il est préférable de montrer le blanc des dents à son prochain [sourire] plutôt que lui faire boire du lait, comme il est dit : "Et les dents toutes blanches (léven chinaïm) de lait" (Béréchit 49, 12) ; ne lis pas léven chinaïm (les dents toutes blanches) mais liboun chinaïm (le blanc des dents) » (Kétoubot 111). Dans le même esprit, nous lisons dans le traité Avoth : « Devance le salut de tout homme. » Une maxime que Rabbi Yo’hanan ben Zakaï appliquait scrupuleusement puisque le Talmud témoigne à son propos qu’il se faisait un point d’honneur de saluer en premier tous les passants dont il croisait le chemin et même le non-Juif au marché.
Les récits suivants prouvent, eux aussi, à quel point nos maîtres s’évertuaient à encourager leur entourage en toutes circonstances :
Parmi les disciples du Rav Israël Salanter zatsa”l se trouvait un étudiant de Torah particulièrement brillant auquel il avait décerné le titre d’illouy. Après son mariage, le jeune homme entra dans le monde des affaires et, durant ses moments de libre, il retournait au beth haMidrach de son maître pour y étudier avec ses anciens camarades. A une certaine période, son commerce se mit à péricliter et l’érudit en conçut beaucoup d’amertume.
Un jour, il se rendit dans la maison d’étude, et souleva une question talmudique particulièrement ardue qu’aucun des disciples ne parvint à élucider. Lorsque Rav Israël Salanter arriva, on lui soumit la question, mais bien qu’il en connût la réponse, il fit mine de rester perplexe face à une telle complexité et s’abstint de la donner. Quand l’étudiant eut quitté le beth haMidrach, le maître du mouvement du Moussar expliqua à ses disciples la raison de son comportement : « Je savais que le moral de cet homme était au plus bas et j’ai donc profité de cette opportunité pour le réconforter en lui donnant l’impression que sa question était si ardue que même moi, j’étais incapable d’y répondre. »
Dans la même veine, on raconte qu’un soir, se tint chez le ’Hazon Ich zatsa”l une réunion urgente à propos de l’annulation du décret de l’enrôlement des filles dans l’armée. La maison était remplie de gens et toutes les pensées du Rav étaient mobilisées vers la recherche de solutions concrètes à cette question brûlante. Et voilà qu’au milieu de tout ce tumulte, entra innocemment un individu qui n’était pas tout à fait sain d’esprit. Lorsque le ’Hazon Ich le vit, il quitta immédiatement ceux qui se trouvaient là, accueillit le pauvre homme avec joie, l’enlaça dans ses bras et lui demanda de ses nouvelles : « Avait-il où manger ? Où dormir ? »
Il manifesta beaucoup d’intérêt et de patience, comme s’il avait oublié tout le sujet brûlant dont il était alors question…