La Haftara du premier Chabbath de ‘Hanouka est issu du livre de Zékharia. Ce dernier fait partie du livre des « 12 prophètes », et compte parmi les derniers prophètes de la tradition juive, avec ‘Haggaï et Malakhi.
A ce titre, leurs prophéties méritent une attention particulière puisque c’est à travers eux qu’Hachem donne ses dernières instructions au peuple juif avant de retirer l’inspiration prophétique du monde. Le nom même du prophète Zékharia peut se comprendre comme « le souvenir de D.ieu », ou souvenir de la Parole divine dans le monde pour l’éternité.
Liens entre la Haftara et la Paracha
La Haftara de cette semaine déroge donc au cours traditionnel des Haftarot déterminées en fonction de leur lien avec la Paracha. Elle a été choisie pour son lien avec la fête de ‘Hanouka. Et, effectivement, plusieurs éléments peuvent rapprocher notre texte de cette fête.
Un premier lien évident concerne la description d’un candélabre qui apparaît à Zékharia dans une vision prophétique. Cette Ménora a été inaugurée à l’époque du prophète Zékharia et du grand prêtre Yéhochoua, et fait écho à l’inauguration de la Ménora sous les ‘Hachmonaïm après leur victoire sur les Grecs.
Mais avant cette intronisation, la Haftara évoque une accusation lancée contre Yéhochoua, le grand prêtre, dont les habits sont salis, notamment en raison de la faute de ses enfants qui se sont unis à des femmes étrangères. Or, la fête de ‘Hanouka fait également référence à une dynastie prestigieuse de grands prêtres, les ‘Hachmonaïm, qui avaient atteint une très grande sainteté, mais qui se sont égarés en cumulant les fonctions de prêtrise mais aussi de direction politique du peuple. Or, la tradition juive enseigne l’importance de distinguer les leaderships spirituels et temporels.
Enfin, nous pouvons voir également dans ce texte de Zékharia une autre allusion au miracle de ‘Hanouka dans la Promesse divine d’apporter un secours providentiel à Yéhochoua et de le purifier de ses fautes, à condition qu’il marche dans les chemins d’Hachem. Précisément, à ‘Hanouka, le peuple va connaître un miracle prodigieux en accédant à une fiole d’huile pure dans un monde que les Grecs avaient voulu impurifier en totalité. Hachem indique ainsi aux hommes que même au cœur d’un monde impur, il est possible de trouver une trace, une lumière de pureté et de sainteté, et qu’il ne faut jamais désespérer. A partir de cette flamme pure, peut-être fragile, les hommes peuvent rebâtir un monde de sainteté et de proximité avec Hachem.
Il est significatif que cette conquête de pureté démarre dans notre texte à partir « d’une pierre » qui, nous dit-on, a sept yeux posés sur elle. A ‘Hanouka, aussi, une seule fiole d’huile qui a brûlé sept jours supplémentaires a amorcé la reconquête de la pureté.
L’écho de la Haftara
Comme chacun le sait, la fête de ‘Hanouka célèbre deux miracles : d’une part la victoire militaire extraordinaire d’une poignée de combattants juifs contre la puissante armée grecque, et d’autre part la restauration miraculeuse de l’allumage de la Ménora du Temple. Celui-ci avait été souillé par les grecs, et les Juifs, soucieux d’allumer la Ménora à nouveau avec de l’huile pure, n’y trouvèrent qu’une petite quantité d’huile susceptible de brûler seulement une journée. Or, cette huile brûla durant 8 jours, donnant ainsi au peuple le temps de constituer à nouveau de l’huile pure.
Ces miracles sont restés gravés dans la tradition juive, et nous les célébrons chaque année avec la fête de ‘Hanouka, à travers l’allumage du chandelier et une liturgie spécifique, faite notamment de louanges et de gratitude envers Hachem pour les miracles dont Il nous a gratifiés, et qu’Il continue chaque jour de réaliser en notre faveur.
Il est un verset de notre Haftara, bien connu, qui résume parfaitement l’état d’esprit de ‘Hanouka et condense à lui seul le secret de l’existence et de la survie du peuple juif à travers l’histoire. Il s’agit bien sûr du verset suivant : « Voici la parole d’Hachem à Zéroubavel : "Ni par le glaive, ni par la force, mais bien par mon Esprit" dit Hachem, maître des légions ». (Zékharia, 4 :6)
Ce merveilleux verset nous rappelle que la force du peuple juif n’a jamais résidé dans sa force physique ni dans ses exploits militaires. Le secret de son existence et de sa longévité exceptionnelle à travers l’histoire réside davantage dans sa foi et son attachement à la Torah, aux Mitsvot et dans sa fidélité à Hachem.
De même, la recherche de « pureté » que nous avons évoquée précédemment passe parfois, dans certaines civilisations, par une violence à l’endroit de ceux qui dérogent à cet objectif, mais aussi par une volonté expansionniste afin d’imposer à tous une même idéologie. Là n’est pas l’ambition de la Torah qui ne compte ni sur le glaive ni sur la force pour accomplir son ambition de sainteté, mais simplement sur son esprit, la force spirituelle de son lien avec l’Eternel tissé à partir de la Torah et des Mitsvot.
Les lumières de ‘Hanouka coïncident avec la période la plus sombre de l’hiver où les nuits sont les plus longues. Mais à partir de ‘Hanouka, les jours commencent à rallonger et la lumière gagne chaque jour davantage de terrain sur l’obscurité. C’est ainsi qu’au coeur de l’obscurité, l’homme doit toujours rechercher la lumière, et la fête de ‘Hanouka nous rappelle précisément qu’il est toujours possible de la trouver, quelle que soit l’obscurité matérielle ou spirituelle qui règne dans le monde.
En effet, la lumière spirituelle, la fidélité à Hachem, déroge aux lois de la nature et elle ne s’appréhende pas de manière quantitative. Sa valeur réside dans la force de l’engagement de chaque individu, dans sa volonté de ne pas céder aux illusions du monde extérieur, mais d’y opposer une volonté farouche d’appliquer la volonté d’Hachem.
C’est ainsi qu’à l’époque de ‘Hanouka, les ‘Hachmonaïm, animés par leur foi et leur amour d’Hachem et de la Mitsva réalisée dans toute sa pureté, ont pu dépasser les règles de la nature, et permettre le triomphe « des bons sur les mauvais, des faibles sur les forts, des purs sur les impurs, d’une poignée sur une multitude » comme l’énonce notre liturgie.
‘Hanouka nous apprend ainsi à ne jamais sous-estimer les petits actes, aussi minimes soient-ils, aussi bien dans le sens positif que négatif. Ceux-ci peuvent créer progressivement des réalités très fortes et permettre des victoires (ou, D.ieu préserve, des défaites) spirituelles et matérielles que l’on ne soupçonne pas. Zékharia écrit ainsi un peu plus tard qu’il ne faut jamais mépriser les petits actes ou les petites décisions qui peuvent être à l’origine de véritables révolutions.
Nos Maîtres nous enseignent effectivement qu’Hachem attend « un réveil d’en bas », un premier mouvement, une première décision, un simple geste pour, en retour, accorder un flux de bénédictions. Aussi, la tradition juive a pu énoncer ce merveilleux principe selon lequel « Méat Mine Haor Do’hé Arbé Mine Ha’hochèkh », un peu de lumière repousse beaucoup d’obscurité.
Puisse Hachem nous donner la force et la lucidité pour réussir à toujours trouver la lumière de la Torah dans l’obscurité de l’exil, et diffuser cette lumière autour de nous !