Le jour où Moran Kupfer, principale figure d’une troupe de théâtre israélienne à grand succès, a annoncé qu’elle quittait le groupe pour vivre sa nouvelle vie dans la Torah, elle bénéficia d’un miracle qu’elle n’est pas prête d’oublier ! Histoire d’une artiste qui a décidé de sublimer ses talents...
La presque-dernière fois où elle était censée monter sur scène, Moran Kupfer n’est pas prête de l’oublier… « Je n’étais plus prête à me produire devant un public mixte. Mais comment faire lorsque vous avez le rôle principal et que personne ne peut vous remplacer ? Si ce n’était un miracle du Ciel, je ne sais pas comment je m’en serais sortie... », raconte Moran, qui revient 20 ans en arrière.
Entre carrière et tradition
La troupe dans laquelle jouait Moran Kupfer était une véritable entreprise familiale puisque s’y côtoyaient les membres de la famille Pin’hassov, des Juifs originaires de Géorgie, père, enfants et même oncles et cousins.
La famille Pin’hassov a depuis toujours été dotée d’un don artistique hors du commun et en Géorgie déjà, ils se produisaient sur scène et dans les fêtes familiales. Avec leur montée en Israël alors que Moran n’a que 5 ans, la famille crée sa propre troupe de théâtre, suite à l’enthousiasme du public à chaque spectacle.
À 14 ans, l’avenir de Moran en tant que danseuse et comédienne semble déjà tout tracé. Côté judaïsme, sa famille est, comme la plupart des Juifs géorgiens, une famille traditionaliste, qui croit en D.ieu et respecte certains préceptes du judaïsme, mais sans forcément en appliquer toutes les modalités… « Nous faisions le Kiddouch, tous ensemble réunis, se souvient Moran. Nous respections la Cacheroute, les fêtes, etc. Notre maison était ouverte à tous et en cela, nous pensions que nos devoirs de Juifs s’arrêtaient là. Les autres Mitsvot nous semblaient exagérées ou désuètes », explique-t-elle.
Le grand tournant
Alors que tout semble aller pour le mieux dans la vie de Moran, qui grandit au sein d’une famille unie et aimante et réussit aussi bien à l’école que dans le spectacle, un événement inattendu va venir bousculer toutes ses certitudes.
« Mon grand frère a commencé à se rapprocher de la Torah. Ce qui me paraissait incompréhensible : mon frère avait tout, était entouré d’amis et réussissait tout ce qu’il entreprenait, pourquoi avait-il subitement besoin d’aller "se réfugier" derrière des préceptes d’un autre âge ? Mais en discutant avec lui, j’ai découvert que derrière le jeune homme sûr de lui, se cachait un être qui cherchait désespérément à donner un sens à sa vie. Le jour où, du Ciel, on envoya deux rabbins orthodoxes taper à notre porte pour nous parler de judaïsme et nous proposer de participer à un séminaire Arakhim (valeurs en hébreu), nous étions tous les deux suffisamment mûrs pour accepter… »
Moran et son frère se rendent donc au séminaire, organisé dans un hôtel du nord du pays. À leur retour, ils ne sont plus les mêmes. « Nous pleurions d’émotion et d’excitation à l’idée d’avoir enfin découvert la vérité. Le problème c’est que nous ne savions pas vraiment par où commencer. Notre ignorance en matière de judaïsme était grande et nous n’avions aucune idée de la manière dont nous devions désormais nous comporter. »
Les premiers temps, Moran veille à ne rien laisser transparaitre au-dehors des changements qui se produisent en elle. À l’extérieur, elle est la même Moran, qui joue et travaille bien à l’école – mais un feu inextinguible qui la pousse à se rapprocher d’Hachem brûle en elle.
Moran commence par appliquer certaines Mitsvot qui lui semblent faisables. Elle se met à observer le Chabbath – quoiqu’à sa façon – et change lentement ses fréquentations. Jusqu’au jour où le test quant à l’authenticité de sa démarche va se présenter à elle…
Un coup de fil tombé du Ciel
« Je me trouvais à un stade où j’avais pris la décision de ne plus me produire devant les hommes. Pour moi, qui était une habituée de la scène depuis mon plus jeune âge, vous imaginez un peu ce que cela pouvait signifier… Mais comment l’annoncer à mon père, chef de la troupe qui m’avait formée depuis toute petite et qui avait placé en moi tous ses espoirs ? Sans compter que nous avions déjà une représentation très importante prévue depuis longtemps. Le dilemme était terrible, mais de l’autre côté, il m’était impossible d’envisager décevoir mon Père, Celui que je venais de découvrir… »
Moran prend son courage à deux mains et décide de parler à son père. « Papa, dit-elle. Tu sais que je me suis renforcée dans la pratique des Mitsvot ces derniers temps, n’est-ce pas ? » « Oui, je le sais, ma fille », répond son père avec bienveillance. « Voilà, j’ai décidé de… de ne plus me produire devant un public mixte. » Silence. Un silence assourdissant… « Je comprends, finit-il par réagir. Mais ce n’est pas un problème, tu n’as qu’à porter des vêtements couvrants », répond son père, avec toute la naïveté du monde…
Moran tente de lui expliquer que le problème ne se situe pas à ce niveau et qu’elle ne peut tout simplement plus jouer et danser devant les hommes. « Et qu’en est-il de la troupe ?, s’insurge son père. Sans toi, ça n’est pas envisageable ! Allons-nous tout plaquer parce que tu n’es plus prête à jouer ? » Devant le silence de sa fille, M. Pin’hassov ajoute, résigné : « Tu sais quoi ? Monte une dernière fois sur scène pour le prochain spectacle et après, tu feras comme bon te semble… »
Si la proposition peut sembler satisfaisante, elle ne l’est pas pour Moran. « Comment trahir Hachem, même une seule fois ? Je ne pouvais pas m’y résigner. De l’autre côté, mon père semblait décidé et je n’avais plus d’arguments à lui opposer. »
Désespérée, Moran se retire dans sa chambre et se met à parler à Hachem, habitude qu’elle a prise depuis quelque temps chaque fois qu’elle ressent le besoin d’être épaulée. « D.ieu, ai-je dit. J’ai fait tout ce qui était dans mes possibilités. Tu sais à quel point je ne souhaite pas Te décevoir. À présent, la situation est entre Tes mains – je T’en prie, fais en sorte que je n’ai pas à outrepasser Ta volonté. »
Et le miracle se produit… Moran retourne dans le salon, près de son père, les yeux rougis par les larmes. « Papa, dit-elle. J’aimerais que tu appelles la salle de théâtre afin de confirmer avec eux la date. » « Tu es tombée sur la tête, ma fille. Ce spectacle est prévu depuis plusieurs mois, pourquoi voudrais-tu qu’il y ait un changement ? », rétorque-t-il. « Je n’en sais rien, mais s’il te plait, appelle-les », répond Moran.
Sans conviction, le père de Moran prend le combiné et compose en soupirant le numéro du patron des lieux. Au fur et à mesure de la conversation, Moran comprend que quelque chose d’inhabituel est en train de se passer. L’expression du visage de son père passe de l’étonnement à la stupéfaction… « Comment cela, un doublon ? Vous avez changé d’agenda et avez planifié un autre spectacle à la même date ?! Les billets sont déjà vendus… C’est impossible ! Bon, laissez-moi réfléchir sur la suite. Au revoir », dit M. Pin’hassov, la bouche bée, pendant qu’il raccroche le combiné…
« Ils se sont trompés et ont planifié un autre spectacle à la place qu’ils ne peuvent pas annuler, m’ont-ils dit. Ils sont confus… Dis-moi, Moran, j’espère que ça n’est pas de la sorcellerie, ton histoire ! »
Des étoiles dans le ciel
Aujourd’hui, Moran Kupfer est mariée à un ex-acteur, lui aussi Ba’al Téchouva et désormais Avrekh à plein-temps. Elle est aussi l’heureuse maman de trois adorables bambins.
Si elle ne se produit plus sur scène devant des publics mixtes, en revanche, elle rencontre un grand succès auprès des femmes, devant qui elle joue et danse lors de soirées ou fêtes 100% féminines. Elle anime également des ateliers artistiques et elle propose des séances de thérapie par le théâtre.
Mais plus étonnant encore, c’est que par son extraordinaire détermination et par l’aide Divine dont elle a bénéficié, Moran est parvenue à entraîner dans son sillage l’ensemble de la famille Pin’hassov ! Tous ses frères sont aujourd’hui des Avrékhim qui étudient la Torah à plein temps et ses sœurs sont toutes mariées à des Avrékhim !
Et ses parents ? demanderez-vous… « Mon père et ma mère ont vu de leurs propres yeux la façon dont la Torah avait bonifié leurs enfants. Ils ont découvert l’atmosphère magique d’une table de Chabbath, le respect encore plus grand que nous avions à leur égard, la joie et la sérénité qui régnaient chez leurs enfants et le regard pétillant de leurs petits-enfants… C’est sans hésiter qu’ils ont, à leur tour, levé leurs yeux vers le Ciel… », conclut Moran avec le sourire.