On a fêté il y a moins d‘un mois la Hiloula du Rabbi Israël Abi’hssira (Baba Salé) et ce fut l’occasion de rapporter des histoires authentiques et inédites concernant ce Tsadik, qui mettent en valeur sa piété et son élévation dans le service divin. Son assiduité dans l’étude de la Torah ainsi que la peine qu’il prenait pour protéger ses yeux de toute ombre d’indécence vont propulser ses prières jusqu’au Ciel et en ouvriront les portes. Ce sont de véritables miracles qui vont se réaliser de la bouche du Tsadik, à l’encontre de tout pronostic médical, juridique, financier et autre.
Personnellement, j’ai eu le mérite de rendre visite à ce Rav exceptionnel dans ma jeunesse, mais ce que je voudrais partager avec vous n’est pas le récit d’un miracle, mais d’un détail a priori anodin qui m’a marqué et que j’associe toujours dans ma conscience avec la personnalité hors du commun de Baba Salé.
J’avais voyagé avec un ami à Nétivot afin de recevoir la bénédiction du Rav. Nous n’avions pas besoin d’adresse, sur place tous les habitants savaient nous indiquer l’emplacement de sa maison. Il habitait au rez-de-chaussée d’un immeuble d’une simplicité incroyable, dans ces logements des villes de développement israéliennes, construites à la vas-vite par le gouvernement pour accueillir les centaines de milliers de Juifs qui arrivaient du Maghreb. On nous a fait asseoir dans le “salon” en attendant d’être introduit auprès du Tsadik, installé dans une chambre voisine. En fait, dans cette pièce d’accueil, il n’y avait qu’une longue table on ne peut plus rudimentaire et des chaises pour la meubler.
Et c’est là que mon regard qui dévisageait les lieux s’est posé sur une bassine posée sur la table avec à l’intérieur du linge propre provenant de la lessive des habitants de la maison. Nous avions d’un côté un personnage qui bouleversait les lois de la création, et de l’autre, sur une table, une bassine avec du linge, qui représentait l’expression d’une vie bien terrestre avec ses besoins élémentaires, sans qu’il n’y ait la moindre contradiction.
Mon ami me racontera qu’à une autre occasion, alors qu’il attendait chez le Rav, la Rabbanite (la femme de Baba Salé) leur avait servi des beignets qu’elle avait confectionnés, naturellement, comme on l’aurait fait avec des membres de la famille.
Il était incroyable à mes yeux occidentalisés de découvrir cet aspect de la vie d’un grand Sage attaché au plus haut point à D.ieu, confronté aux mêmes réalités de la vie de tous les jours, comme chez l’ensemble du commun des mortels.
Comme nous sommes loin des ambiances silencieuses de recueillement, dans lesquelles la spiritualité s’exprime par une ambiance mystérieuse qui encourage un sentiment planant et irréel ! Pas de musique évoquant on ne sait quel envoûtement, pas de peur pour nous préparer à une expérience religieuse, pas de rideaux lourds, de boiseries, de toiles, d’encens ou d’objets impressionnants.
Dans la maison de Rabbi Israël Abi’hssira, on cuisine, on lave du linge, on vit avec les voisins de son immeuble. Cette bassine de linge déposée sans intention particulière sur la table est à mes yeux porteuse de message : celui de la Vérité absolue sans fard et sans masque.
Ce souvenir m’a permis de comprendre la juxtaposition entre la Paracha de Yitro, que nous avons lue la semaine passée et qui rapporte la révélation de D.ieu au peuple hébreu par les 10 Commandements, et celle de Michpatim que nous lisons cette semaine qui nous rapporte les lois des relations entre les hommes (vols, dommage, prêt, salaire, etc.).
Après l’expérience spirituelle intense du mont Sinaï durant laquelle leur âme s’est “envolée”, on passe à la nécessité urgente de savoir comment gérer les relations humaines dans tous les domaines de la vie terrestre.
Seule une Torah dévoilée par D.ieu le Créateur peut nous indiquer la voie royale qui nous permet de nous élever tout en se préoccupant de détails qui sont on ne peut plus matériels.
Que le mérite du Tsadik Sidna Baba Salé nous accompagne à jamais.