Bonjour,
En fait, il y a une inexactitude dans la Halakha que vous énoncez.
Les bêtes sont toutes interdites dès lors qu'elles se sont déplacées sur la terre : "Cherets Hachorets Al Haarets". Choul’han ‘Aroukh Yoré Déa 84.4.
Tant que les arbres sont rattachés au sol, les bêtes qui naissent dans les fruits sont considérées comme des bêtes qui se sont déplacées sur le sol. En effet, la bête se déplace dans le fruit, qui est rattaché à l'arbre, qui est rattaché au sol.
Les bêtes qui ne sont pas interdites par la Torah en tant que bêtes qui se sont déplacées sur le sol sont les fruits nés dans un fruit alors que le fruit était détaché de l'arbre. Il faut aussi évidemment que la bête ne soit jamais sortie du fruit.
Ainsi, le Choul'han Aroukh permet à la consommation les vers nés dans le fromage
(on parle d'asticots nés dans le fromage après que des mouches aient pondues leurs œufs alors qu'ils étaient à l'état microscopique). Le Choul'han Aroukh précise toutefois qu'il n'est permis de consommer ce fromage que si les asticots ne nous dégoûtent pas. Dans le cas contraire, on enfreint l'interdit de Bal Téchakétsou, c'est-à-dire de se rendre répugnant. Il me semble que, de nos jours, la plupart des juifs sont dégoûtés par les asticots. Par ailleurs, une personne qui consommerait ces asticots et pas le fromage, enfreindrait cette interdiction, même si ça ne le dégoûte pas. (En effet, on considère que consommer des asticots est objectivement répugnant, et que ce qui est relativement répugnant c'est de consommer un fromage véreux.)
Mais pour revenir aux fruits, quand on voit un ver dans une cerise, on ne peut pas savoir s'il est né alors que le fruit était rattaché à l'arbre ou pas. Donc, dans le doute, les vers sont évidemment interdits, et les cerises nécessitent une vérification.
On peut donc légitimement se poser la question suivante : puisqu'il est impossible de savoir si une bête est née dans un fruit alors que le fruit était détaché de l'arbre ou non, pourquoi la Torah nous enseigne-t-elle cette loi qui semble ne pas avoir d'incidence pratique ?
En fait, on pourra trouver des cas où l'absence de signe d'infestation extérieure autorise à manger un fruit sans vérification.
Il faut pour cela qu'on soit sûr à 100% que s'il y a des bêtes, elles sont nées alors que le fruit était détaché de l'arbre. C'est le cas par exemple quand un fruit a été séché pendant plus de douze mois. Car, en principe, un rampant ne peut pas vivre plus de 6 mois, et se décompose nécessairement dans les 6 mois suivants.
En bref, après 12 mois, une bête est considérée comme de la poussière. Choul’han ‘Aroukh Yoré Déa 84.8.
Evidemment, on suppose que des bêtes présentes dans le fruit ont pu donner vie à une progéniture. Mais cette progéniture n'est pas interdite par la Torah puisqu'à l'évidence, elle est née dans le fruit alors qu'il était détaché de l'arbre.
Mais ces cas sont assez théoriques, puisque rares sont les personnes qui font sécher les fruits 12 mois. De nos jours, les fruits sont séchés dans des fours en quelques heures.
En résumé, voici toutes les conditions qui doivent être réunies pour qu'on puisse consommer une variété de fruits réputées infestées sans les vérifier :
1. Que le fruit ait séché 12 mois après être détaché de l'arbre,
2. Qu'il n'y ait aucun signe d'infestation extérieur,
3. Si en mangeant on s'aperçoit qu'il y a des bêtes, il faut que ça ne nous dégoûte pas pour continuer à manger,
4. Même si ça ne nous dégoûte pas, on ne pourra pas manger uniquement les bêtes sans le fruit.
Kol Touv.
