Chalom Rav,
Est-il interdit de s'attirer sur soi des souffrances d'après la Torah ? Et si non, alors pourquoi dit-on "Haréni Kapparat Michkavo" lorsque l'on perd un parent ?
Merci.
Bonjour,
1. Provoquer des situations entraînant une "souffrance"
Il n'est pas interdit de provoquer des situations entraînant une certaine "souffrance" / "difficulté" à surmonter si c'est dans l'intention d'obtenir le pardon de ses fautes. A ce sujet, voir le commentaire du Gaon de Vilna sur Michlé 27, verset 6 ainsi que Pélé Yoèts, chapitre Yissourim" et Tania, chapitre 27.
Attention, il s'agit de "souffrances" ne portant absolument pas atteinte au corps et c'est uniquement dans la mesure où cela n'entraînera pas un empêchement d'étudier la Torah et d'accomplir correctement les Mitsvot. Choul'han 'Aroukh - Ora'h 'Haïm, chapitre 571, Halakha 2, Kaf Ha'haïm, chapitre 571, passage 3.
Généralement, ces souffrances portent le nom de Sigoufim.
Il peut s'agir d'un jeûne volontaire, d'une douche à l'eau dont la température n'est pas élevée ou de toute autre privation [jeûne de la parole, par exemple]. Choul'han 'Aroukh - Ora'h 'Haïm, chapitre 565, Halakha 6 et Kaf Ha'haïm, passage 32, Michna Broura, chapitre 220, passage 6, chapitre 571, passage 4, Choul'han 'Aroukh - Ora'h 'Haïm, chapitre 570, Halakha 1.
Rabbi Avraham Bar David [le ראב"ד] affirme que stopper la consommation d'un aliment [agréable] en plein milieu est très bénéfique. Fin de Ba'alé Hanéfech, rapporté dans Kaf Ha'haïm, chapitre 571, passage 7 et Michna Broura, passage 2.
Il va sans dire que ces Sigoufim doivent être accompagnés d'une vraie Techouva sincère, visant un éloignement de la faute. Ritva sur Roch Hachana 16b.
N'oublions surtout pas ce que disent nos Sages, les 'Hakhamim : "Rava dit : [après la destruction du Beth Hamikdach] quiconque étudie la Torah n'a pas besoin de sacrifices pour se faire pardonner". Talmud Mena'hot 110a.
"Un homme ayant fauté, s'il avait l'habitude d'étudier une page, qu'il en étudie deux, s'il avait l'habitude d'étudier un chapitre, qu'il en étudie deux". Midrash Rabba, chapitre 25, passage 1 sur Vayikra.
2. Dire : "Haréni Kapparat Michkavo" - Comment est-ce permis ?
Durant les 12 mois suivant le décès du père ou de la mère, il faut dire Haréni Kapparat Michkavo[a] lorsque l'on mentionne ses parents. Talmud Kiddouchin 31b, Choul'han 'Aroukh - Yoré Déa, chapitre 240, Halakha 9.
Rachi explique le sens de cette phrase :
"Que s'abattent sur moi tous les châtiments et toutes les souffrances que mon père [ma mère] doit subir"
Dans le Talmud Soucca 20a, Rachi explique d'une manière quelque peu différente :
"Que les souffrances que j'endure soient un pardon pour mon père".
D'après ce commentaire, le fils ne demande pas des souffrances mais il prie pour que ses souffrances soient un pardon pour son père. Voir Betsel Ha'hokhma, volume 6, réponse 18 et Chévet Halévi, volume 10, réponse 158, à propos de cette différence.
Nombreux sont nos maîtres qui se posent la question : comment est-il permis de dire la phrase précitée alors qu'il est interdit de demander des souffrances aussi dures que celles du Guéhinam" car il n'est pas certain qu'elles seront supportables ?
Première réponse
Comme nous l'avons vu au début de cette réponse, il n'est pas interdit de se souhaiter des souffrances mais c'est à condition qu'elles soient supportables et surtout si c'est dans l'intention d'épargner son papa.
Seconde réponse
Certains de nos maîtres affirment que la phrase est dite Bedérekh Tefila. C'est à dire que l'on ne reçoit jamais de souffrances à la place de son père mais le fait même de s'exprimer de la sorte est une forme de "respect" envers son père et grâce à cette Mitsva, les châtiments qui reviendraient au père son allégés. Commentaire Haboné sur 'Ein Yaacov, Kiddouchin 31b, Techouvot Véhanhagot, volume 2, réponse 447, Betsel Ha'hokhma, volume 6, réponse 20.
Certains commentateurs ne sont absolument pas d'accord avec la réponse précédente car il ne semble pas que nos Sages aient exigé que l'on sorte de la bouche des paroles ne reflétant pas une réalité. Betsel Ha'hokhma, volume 6, réponse 20.
Troisième réponse
Le sens de Haréni Kapparat Michkavo est : "Je suis [Haréni] celui qui grâce à ses actions est en mesure d'alléger le jugement [Kapparat Michkavo] de mon père grâce à mes actions".
Dans cette explication, il ne s'agit pas de "souffrances" [permettant de venir en aide au père], mais tout simplement de Mitsvot et de bonnes actions.
Nous sommes à votre disposition, Bé’ézrat Hachem, pour toute question supplémentaire.
Qu’Hachem vous protège et vous bénisse.