Respecter des parents critiquables

Bonjour,

Votre question évoque une situation très douloureuse ; grandir ayant subi des abus conditionne profondément une personne, et, ce, dans nombres de domaines de la vie : bien-être mental, estime de soi, capacité à créer des relations saines, sont des défis pour celui ou celle qui a vécu une telle enfance.

Parce que ces situations sont complexes, parce que l’histoire de chacun est unique, parce que la capacité et les opportunités de chacun à se reconstruire sont différentes d’une personne à une autre, ma réponse constitue des principes généraux qui ne sauraient être applicables dans tous les cas.

Peut-être avez-vous pu, avec l’aide d’Hachem, vous construire, vous avez pu développer des relations saines et établir une vie sociale et familiale saine, ce qui vous permet d’aborder les contacts avec vos parents avec du recul. Dans ce cas, vous pouvez élargir ce que vous faites avec et pour vos parents, dans la mesure de ce qui ne porte pas préjudice. Garder un contact, les recevoir, etc.

Ou bien, il se peut que votre blessure soit encore à vif, et que toute relation avec vos parents soit douloureuse. Il se peut que leur attitude aujourd’hui encore, envers vous, votre conjoint ou vos enfants soit abusive.

Dans ces cas-là, vous devez penser à vous protéger, pour ne pas qu’il y ait atteinte à vous ou vos proches. La Mitsva de respecter ses parents est codifiée par la Halakha : un homme nourrira son père, l’habillera, le fait entrer et sortir. Il ne s’assoit pas à sa place, ne parle pas à sa place.

En accomplissant ces actes lorsqu’ils se présentent, vous accomplissez a minima la Mitsva. N’envisagez pas de rencontrer ou recevoir vos parents tant que cela entraine de la douleur ou un préjudice. Cela vous sera difficile et ce sera un message probablement difficile à faire passer, mais vous devez vous donner l’espace pour vous construire et ne pas souffrir.

Une manière de les honorer serait peut-être de demander à Hachem d’avoir un jour les forces de ne pas les juger, de pouvoir les "regarder en face". Eux aussi souffrent de leur attitude, et en tous cas de l’éloignement que cela a entrainé. Ne pas les juger, c’est déjà un défi, ne vous en voulez pas si vous n’y arrivez pas encore. Cela n’est pas facile et cela demande souvent une aide extérieure, mais en y arrivant, ce sera la première pierre dans l’édifice de votre Mitsva. Ils ne s’en rendront pas compte, mais vous aurez fait là un Mikdach Katane d’une valeur inestimable.

Que ce soit la volonté d’Hachem que nous vivions bientôt le temps annoncé par le prophète, "Il ramènera le cœur des pères à leurs enfants, et le cœur des enfants à leurs pères".

Braha Véhatsla'ha !

Rav Yonathan Sebban - Enseignant et psychothérapeute