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Ouvrir du vin pour un Mé'halel Chabbath

Rédigé le Dimanche 3 Août 2014
La question de Agathe S.

Bonjour,

Je voudrais savoir pourquoi un juif qui ne respecte pas le Chabbath ne peut pas ouvrir une bouteille de vin s'il-vous-plait ?

Merci d'avance.

La réponse de Rav Gabriel DAYAN
Rav Gabriel DAYAN
40078 réponses

Chalom,

Nos Sages ont interdit la consommation de vin appartenant, fabriqué ou manipulé par un non-juif.

Le vin manipulé par celui ou celle qui profane le Chabbath prend le statut d'un vin appartenant à un non-juif et donc, devient interdit à la consommation.

Les détails de la Halakha concernant ce sujet sont assez nombreux.

Dans certains cas, exceptionnels, il est possible d'adopter une attitude permissive. Mais il faut soumettre la question à un Rav au préalable.

Afin de comprendre la gravité de la profanation du Chabbath, voici quelques idées :

Durant les six jours de la semaine, l'homme est plongé dans ses occupations : il transforme son entourage, s'investit corps et âme dans l'amélioration de son bien-être, et doit également travailler "à la sueur de son front" pour obtenir les moyens lui permettant de survivre (la "lutte pour l'existence").

Ces/ses occupations sont fréquemment causes de tourments, d'inquiétudes, voire même d'angoisses. Bien plus que cela, elles sont dans bien des cas, à l'origine de la distance séparant l'homme de son Créateur.

Le Rav Munk écrit : "La menace de la faim, réelle ou prétendue, fait oublier tous les principes et réduit à néant les meilleurs engagements. Aussi longtemps que l'homme n'est pas libéré de l'angoisse que provoque en lui le souci de la subsistance, il n'y a point de place pour la réalisation intégrale de la loi divine. Cependant, la délivrance de cette obsession n'est possible que grâce à la prise de conscience que le souci de subsistance, premier de tous nos soucis, ne repose pas seul, et pas en premier lieu, sur nos épaules. Il incombe à l'homme, dans ce domaine, comme en bien d'autres, de faire son devoir, tout en confiant la réussite à la constante sollicitude du Créateur. Sans cette prise de conscience, l'homme rivé à la poursuite du gain matériel, ne connait pas de limite dans sa lutte pour l'existence. Elle le poussera sans cesse à la recherche de nouveaux profits, sans égards pour autrui, et elle ne tolèrera auprès d'elle aucun autre objectif et aucun autre idéal."  (Commentaire sur Chémot 16/2).

L'homme pourrait même se dire dans son cœur : "C'est ma force et la vigueur de ma main qui m'ont conquis cette puissance" (Dévarim 8/17).

Durant Chabbath, la Torah exige de l'homme de s'effacer et de ne plus intervenir dans son entourage. Toute action par laquelle il manifestera sa maîtrise, sera interdite. Il ne devra plus agir sur le monde afin de ne pas manifester sa domination et son influence.

Ainsi, il laissera apparaître la grandeur du Créateur dans toute sa splendeur.

Nos maîtres expliquent que l'homme doit laisser la nature intacte sans la changer d'aucune manière, sans quoi il est considéré comme empiétant dans l'empire du Créateur.

Durant Chabbath, l'homme est en paix avec le monde, il n'use plus de son pouvoir pour le transformer.

Délaisser ses affaires, sa profession, c'est sanctifier le nom du Créateur; c'est témoigner qu'Il a créé le monde en six jours et qu'Il le dirige.

C'est aussi et surtout, proclamer que tous les êtres Lui obéissent et se soumettent à Sa volonté. Durant Chabbath, ces croyances se transforment donc en réalités beaucoup plus claires et tangibles et l'on se retrouve en toute pureté auprès du Créateur en profitant d'une approche "véritable" et "transparente".

C'est avec cet état d'esprit que nous devons aborder le Chabbath et c'est avec cet état d'esprit que nous devons vivre chaque instant de la semaine à venir !

Le Rav Munk l'explique bien : "L'arrêt du travail au jour du Chabbath fait prendre conscience à l'homme que, s'il est libre durant la semaine d'exploiter les sources de la nature à son profit, de manier à son gré les moyens de production, il n'en est pas pour autant le dominateur ni le véritable propriétaire. Lorsqu'arrive Chabbath, il se sépare de tous ses pouvoirs et les dépose humblement aux pieds du Créateur" (Rav Munk sur Chémot 20/10).

Le Rav R. Eisenberg écrit : "S'abstenir de tout travail créatif, particulièrement dans le monde moderne où règne une insécurité croissante, témoigne d'une confiance en Hachem et d'une soumission à Celui de qui dépend la réussite matérielle. La seule manière de reconnaître explicitement la supériorité incontestable de l'Eternel sur toute la Création est de cesser nos activités quotidiennes, de prendre du recul et de percevoir la main de Hachem cachée derrière le système de cette Création" (Survivre, pp. 134-135).

D'autre part, tout au long de la semaine, l'homme est privé d'une certaine autonomie, il est attaché au monde matériel et dépend presque totalement de son entourage, il est en quelque sorte, l'esclave du milieu dans lequel il se trouve. En effet, il est commandé par la nécessité de "régner" sur le monde pour gagner son pain. Le Chabbath, il est libéré de cet asservissement, il peut vivre en harmonie avec tout ce qui l'entoure. En effet, durant cette journée, c'est l'inaction et le repos qui sont exigés. Dès lors que l'on ne fait aucun des travaux interdits, on est certain d'accomplir la Mitsva du Chabbath. L'homme est un roi. Chabbath est la reine. Sanctifier Chabbath, c'est donc mettre en évidence ce côté passif de l'être, qui durant cette journée se sépare de tout le reste du monde et se tourne vers le Créateur Qui lui assure toutes les bénédictions.

Le Chabbath arrive donc pour rappeler à l'être humain qu'il y a un Maître au monde et qu'il est nécessaire de le servir.

Celui ou celle qui profane le Chabbath n'accepte pas cette vérité.

Ceci est vraiment très grave étant donné que la création du monde et l'existence même de l'être humain est basée sur ce fondement !

Kol Touv.

Mékorot / Sources : Rav Elie Munk, Survivre.
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