Il est écrit dans la Parachat Nasso : וְאִישׁ אֶת קֳדָשָׁיו לוֹ יִהְיוּ אִישׁ אֲשֶׁר יִתֵּן לַכֹּהֵן לוֹ יִהְיֶה, "Les choses saintes que l’homme possède seront à lui, et ce qu’on offre au Kohen lui appartiendra" (Bamidbar 5, 10).
Un homme avait trois amis : Réouven, Chim'on et Lévi. Il aimait énormément Réouven et tenait cette amitié pour réciproque. Il avait également de l’amitié pour Chim'on, sans toutefois le considérer comme son ami intime. Avec Lévi, enfin, il entretenait des relations moins étroites et jamais il ne se serait imaginé que ce dernier puisse nourrir à son égard plus d’affection qu’il n’en ressentait lui-même.
Un jour, il fut invité à se présenter devant le roi. La raison de cette convocation lui était inconnue et il était bouleversé, redoutant le pire : peut-être avait-on médit sur lui et risquait-il la peine de mort ! Il s’enquit du soutien de ses amis : peut-être l’un d’entre eux consentirait-il à l’accompagner auprès du roi et à intervenir en sa faveur. À sa grande surprise, Réouven, en qui il pensait pouvoir placer toute sa confiance, refusa purement et simplement de le suivre. Chim'on quant à lui, promit de le suivre jusqu’aux portes du palais, mais prévint toutefois qu’il ne saurait en aucune manière se risquer à pénétrer plus loin.
C’est ainsi qu’il fut contraint de se tourner vers Lévi. Après avoir essuyé le refus de ses deux grands amis, il ne s’attendait guère à ce que le troisième lui fasse une meilleure réponse. Cependant, à sa grande stupéfaction, non seulement celui-ci accepta de l’accompagner jusque dans la salle du trône, mais il lui assura encore qu’il n’aurait de cesse que de défendre sa cause auprès du roi !
En fin de compte, Réouven ne prit même pas la peine d’accompagner son ami. Chim'on le suivit jusqu’à l’entrée du palais royal comme il l’avait promis, mais ne pénétra pas plus loin. Lévi, quant à lui, se présenta avec son ami devant le roi, plaida sa cause et lui sauva la vie. Il s’avéra ainsi que le véritable ami, celui qui était prêt à tendre la main et à l’aider dans sa détresse, était précisément celui dont à aucun instant on n’eut supposé qu’il soit susceptible d’autant d’affection et de dévouement.
Le ’Hafets ’Haïm usait ainsi de cette parabole : l’argent, si cher à celui qui le possède est semblable à Réouven. Tout au long de la vie, il semble être le véritable ami de l’homme et son meilleur soutien. L’homme s’imagine que l’argent le préserve de toutes les souffrances et l’assure contre toutes les vicissitudes de l’existence. Cependant, l’unique épreuve qui permet de révéler l’amitié sans faille est celle de la mort.
Quand vient le moment de quitter ce monde, l’homme n’est accompagné ni par l’argent, ni par l’or, ni par les pierres précieuses et les perles, mais uniquement par la Torah et les bonnes actions (Avot 6). L’argent ne se tient pas à ses côtés au jour du trépas et il refuse de l’accompagner ne serait-ce qu’aux portes de sa dernière demeure.
Les membres de la famille et les amis ressemblent à Chim'on. Ils ne délaissent pas l’homme au jour de sa mort. Ils le pleurent et le suivent jusqu’au tombeau. Néanmoins, parvenus au seuil de cette ultime demeure, ils se séparent de lui et l’abandonnent à son sort.
Seules la Torah et les bonnes actions sont les authentiques amis de l’homme, ceux en qui il peut avoir pleine confiance et qui l’accompagnent tout au long de ce grand voyage, jusqu’auprès du Trône de Gloire.
Le verset « Les choses saintes que l’homme possède seront à lui » vient nous rappeler et nous faire connaître nos véritables amis, nos meilleurs avocats, prêts à intervenir en notre faveur devant le Tout-Puissant. Ils se maintiennent auprès de nous en toutes circonstances pour l’éternité. Nous nous devons de développer cette amitié, de multiplier ce genre d’amis tout au long de notre vie et nous profiterons alors de leur compagnie à tout jamais.