Jeune fille, je m’imaginais que l’étape la plus difficile était de trouver mon conjoint. Mais une fois la ‘Houpa passée, un autre défi de taille s’est présenté à moi : ma belle-mère. Est-ce qu’on était condamnées à toujours se faire la guerre ?
La guerre froide
Mon mari a toujours été proche de ses parents et c’est une des choses qui m’a plu chez lui dès notre rencontre : je voulais me marier avec une personne pour qui la famille est au centre des priorités et bien sûr, cela voulait dire la sienne tout autant que la mienne.
Ce que je n’avais pas anticipé, c’est que ma belle-mère serait du genre “intrusive”. Au début de notre mariage, c’était des petites réflexions sur le choix de mes plats de Chabbath (“Tu sers du poulet le vendredi soir ? Ce n’est pas très chabbatique”) ou sur mes envies de décoration (“Encore un miroir, ça va devenir la ‘galerie des glaces’ chez vous !”). Quand je suis devenue maman, c’est monté d’un cran et ma belle-mère se permettait maintenant des critiques sur la façon dont j’éduquais mes enfants : si je leur donnais un gâteau devant elle, j’avais le droit à “Tu ne penses pas qu’ils ont déjà mangé assez de sucre aujourd’hui ?” et si au contraire je le leur refusais, je pouvais avoir le droit à “Tu penses que c’est gentil de leur refuser ? Leurs petits copains ont le droit d’en prendre, eux, non ?”
Quoi que je fisse, c’était toujours prétexte à réflexion de sa part. Moi qui ne suis pas susceptible de nature, avec elle j’ai fini par atteindre les limites de la patience et chaque fois, je menaçais un peu plus d’exploser.
Du coup c’était la guerre froide entre nous. Mon mari le sentait et je voyais bien que ça lui faisait de la peine, même s’il ne me disait rien. Et je crois que son silence ajoutait à ma culpabilité.
Bref, la situation était classique. Souvent la phrase du Rav Benchetrit me revenait en tête : “Ils se marièrent pour le meilleur...et pour la belle-mère”. Il n'empêche que je n’avais pas envie de vivre une relation de tensions dans la famille. Je voulais que les choses changent… Mais comment ?
Honneur et respect selon la Torah
Je savais que respecter mes parents était une injonction de la Torah. Mais est-ce que c’était aussi une obligation vis-à-vis de mes beaux-parents ?
Eh bien oui ! Et peu importe qu’on ait de bons rapports avec eux ou non ! Le Roi David n’avait pas vraiment de relation cordiale avec son beau-père, le roi Chaoul. En fait, le roi Chaoul essaya de tuer David, qui dut se cacher dans une grotte. Quand Chaoul le retrouva, David eut l’opportunité de tuer son beau-père… Mais il ne le fit pas ! Il présenta ensuite la preuve de sa retenue à Chaoul en le nommant “père”.
De là, on apprend dans le Choul’han Aroukh que c’est une obligation d’honorer ses beaux-parents au même titre que ses propres parents.
Comment donc témoigner du respect à ma belle-mère, puisque c’était ce que Hachem attendait de moi ?
Déjà en me mettant à sa place pour quelques minutes :
De la même façon que je m’occupe sans relâche de mes enfants, ma belle-mère s’est occupée de son fils tous les jours et toutes les nuits. C’est elle qui l’a nourri, habillé, qui lui a appris à marcher, qui l’a emmené chez le médecin. C’est elle qui s’est inquiétée à chaque fois qu’il rentrait tard. Et c’est grâce à elle qu’il a pu grandir et se construire, pour avoir envie à son tour de créer son foyer et élever ses enfants.
C’est sûr que vu sous cet angle.. j’avais plutôt envie de lui dire merci !
Ensuite, de la même façon que dans les Pirké Avot (1, 6) on apprend qu’“on a l’obligation de juger l’autre avec un œil favorable”, je dois aussi appliquer cet enseignement à ma belle-mère !
Et si... elle ne cherchait pas uniquement à critiquer chacune de mes décisions ? Et si elle ne remettait pas mes capacités de mère en question mais qu’elle essayait uniquement de donner son avis… de se rendre utile ?
Savoir donner une place
Dans la Méguilat Routh, on apprend que la grandeur de Routh tient au fait qu’elle décida d’accompagner sa belle-mère Naomi alors qu’elle avait la possibilité de partir et de retourner à sa vie de princesse. L’attention et le respect qu’elle témoigna envers sa belle-mère lui donnèrent le mérite d’être la grand-mère du roi David, mais également du Machia’h !
Tout est donc une question de place… et d’équilibre !
Forte de ces réflexions, j’ai mis en pratique mes nouvelles résolutions pour améliorer mes relations avec ma belle-mère.
J’ai décidé de la solliciter pour me donner des conseils (alors qu’avant je la tenais à distance au maximum) : quel plat de Chabbath faire quand je reçois un grand nombre de personnes à table ?
Comment faire manger des légumes à mon plus jeune qui n’ouvre la bouche que pour des aliments sucrés ?
De façon surprenante, plus je fais appel à ma belle-mère et moins elle me fait de remarques !
Depuis que j’ai réalisé qu’elle était une mère… tout comme moi, je ne la vois plus comme une ennemie. C’est même l’opposé. Je tiens à ce qu’elle ait une place dans ma maison et dans la vie de ses petits-enfants.
Finalement, je fais ce que j’aimerais que ma future belle-fille fasse à son tour. Car un jour, moi aussi je deviendrai belle-mère...